Mon Histoire - Partie 17
Rien que de comprendre cela avait
été une avancée. Il se sentait décoller et avancer, un peu comme quand il
reprendra l’avion vers l’aéroport de Kastrup dans les mois qui suivront – mais
ça il ne le sait pas encore. C’était après être rentré en Belgique qu’il avait
réalisé ce qui s’était vraiment passé là-bas. Il avait beaucoup appris sur
lui-même, mais il ne savait pas trop comment l’exprimer. La Suède pour lui, ce
n’étaient pas des mots mais c’étaient plutôt des odeurs, des sons. C’était
l’odeur du café filtre très fort et des gâteaux à la cannelle à la gare et à
l’université au matin. C’était le goût de l’aneth et du saumon au repas du
soir. C’était le bruit du vent et de la corne de brume du ferry vers le
Danemark. Ce n’était pas grand-chose d’autre, mais c’était déjà ça.
C’était sa vie là-bas. C’était sa
vie et il s’y était habitué. Quelques semaines seulement après l’avoir
rencontré, il a emménagé avec Philip dans son minuscule studio à Lund. Il se
rapprochait de l’université. Mais pas seulement. En fait, il aurait voulu que
cela dure plus longtemps, que ce soit plus qu’un songe et qu’une parenthèse
mais il y avait déjà une chose dont il était convaincu à cette époque :
c’est qu’il ne faut pas toujours en vouloir plus de la vie que ce qu’elle a à
donner. D’un point de vue matériel s’entend. Vouloir posséder toujours plus est
la manière la plus certaine de creuser son propre malheur.
Alors la solution, c’est de
profiter de ce que l’on a. Et surtout, de le faire bien.
Vivre à moitié n’est pas une
solution satisfaisante.
Mais après avoir fait les choix
qui s’imposaient, il se sentait bien mieux. Le bouillonnement intérieur était
maintenant un sentiment plutôt agréable. Les soixante secondes de chaque minute
étaient remplies de vie. Et c’était bien.