Mon Histoire - Partie 7

Même s’il savait que cela était malsain, il jalousait ceux qui avaient eu de la chance d’avoir un logement à Lund, qui organisaient des soirées où chacun amène sa propre gnôle et parle anglais avec des accents venant des quatre coins de l’Europe ; bref, d’être un vrai étudiant Erasmus, comme dans l’Auberge espagnole. Mais après tout ce n’était que le début de l’expérience. D’autres choses lui arriveraient encore et il était loin de se douter que de tous ces autres qu’il jalousait, ce serait lui qui se retrouverait à nouveau en Suède un peu plus d’un an plus tard pour fêter Noël avec sa belle-famille. Contrairement aux autres, il enlèvera progressivement le scaphandre de l’anglais pour se plonger plus profondément dans ce royaume du Nord, si proche et pourtant si lointain. Il se rendra lui-même perméable aux autres, à leurs idées, à leur langue, à leurs sentiments mêmes. Jusqu’au dégoût presque, le dégoût du Nord,

Pourtant et bien qu’il fût élevé en français, il avait toujours pensé se sentir plus proche du Nord que du Sud. Il avait beaucoup apprécié ses séjours aux Pays-Bas où il s’était retrouvé après la fin de sa rhéto, étudiant échange vivant avec une famille néerlandaise. En Belgique, il a été plus rapide que les autres pour venir à bout de l’enseignement que l’on considère comme obligatoire. À trois ans, son grand-père lui avait appris à lire. En fait non, il a découvert le plaisir immense de la lecture dans atlas colorés de son grand-père tous les jours après l’école. Il commençait alors à peine à découvrir le monde et il ressentait déjà qu’il n’allait jamais pouvoir être comme les autres.

Il ne savait, bien entendu, pas encore que tout le monde est unique et que la différence entre les hommes n’est qu’un concept vague et obscur, exploité par certaines personnes aux idées encore plus vagues et surtout encore plus obscures. Lui, il a été différent dès le début de l’école primaire alors il sait ce que ça fait de ne pas ressembler aux autres.